Charles-Guillaume-Frédéric Dumas to the Committee of
	Secret Correspondence
	AL and copy: National Archieves; letterbook draft: Algemeen Rijksarchief,
	the Hague
	                  Utrecht 14e. May [-June 6,] 1776.
	Messieurs,
		Après vous avoir donné ci-joint copie ou extrait de ce qu’il y
		avoit de plus essentiel dans ma premiere dépeche que je nommerai
		A pour la briéveté, je commence celle-ci, que je nomme B, en
		forme de Journal. Ayez la bonté, conséquemment, lorsque vous
		m’écrirez, de me marquer que vous avez reçu, ou non, la Dépeche
		A, la Dépeche B &c.
	
		J’avois écrit le 9e. à la personne qui m’avoit écrit la Lettre du
		6e. dont je vous ai donné la copie, que si ce qu’il avoit à me dire
		pressoit j’irois et reviendrois deux nuits de suite pour être auprès
		de lui le jour du dimanche, 12e., qui est entre deux, mais que si
		l’entrevue pouvoit souffrir une semaine de délai, je pourrois faire
		le voyage un peu plus commodément et sans inconvénient. Voici
		ce qu’il me répondit le lendemain 10e. May.
	
		“J’ai reçu, Monsieur, la Lettre que vous m’avez fait l’honneur de
		m’écrire. J’obéis dans l’instant à l’ordre que vous me donnez de
		vous répondre sur le jour où je pourrai avoir le plaisir de vous voir.
		Comme ce que j’aurai l’honneur de vous dire ne presse pas, vous
		pouvez, Monsieur, remettre au Samedi que vous me proposez, et
		qui sera de Samedi prochain en huit, c’est-à-dire, le 18 de ce mois,
		la visite dont vous me flattez, et qui est la plus intéressante que je
		puisse recevoir. Oserois-je vous prévenir [sur l’offre des fraix dans
		tous les cas ou vos bontes me seroient utiles? Car un homme tel
		que vous, par ses connoissances, n’est pas borne a un seul genre de
		bons offices.] Flatté, honoré de la connoissance que j’aurois faite
		avec vous, je serois au désespoir de vous être à charge et d’en
		abuser. J’ai l’honneur d’être bien respectueusement, Monsieur, à
		vos ordres.”
	
		Ne croyez pas, Messieurs, qu’une puérile vanité me fasse vous
		rapporter cette lettre, et m’attribuer réellement les douceurs qui
		
		m’y semblent adressées. Je veux seulement vous faire remarquer
		combien [on caresse le serviteur pour l’amour du maitre.]
	
 
	Mardi 21e. May 1776
		Me voici, Messieurs, de retour de mon voyage, dont je suis fort
		content, parce que je crois que vous aurez lieu de l’être. Après
		nous être entretenus quelques instants de la grande nouvelle, et
		toute récente, de l’évacuation de Boston par vos ennemis, comme
		d’un nouveau trait de la sagesse de vos opérations Messieurs, Le
		Roi d’A. me dit notre homme (dont j’ai dû promettre de ne pas
		encore vous décliner le nom) ne s’oublie pas non plus de son côté
		comme vous voyez; et il me montra dans une Gazette un Edit
		prohibitif fort severe de l’Imperatrice Reine d’Hong. contre toute
		exportation d’armes et munitions de ses Etats pour l’Amérique.
		Je l’avois déjà vu, et le lui dis: mais ce que vous ne savez pas,
		reprit-il, c’est que le roi a demandé cela à l’Impératrice par une
		Lettre écrite de sa propre main. Je lui fis connoître que j’espérois
		que sa Cour ne seroit pas si partiale. [Vous allez entendre,] me dit-il,
		vous avez de l’esprit; ainsi vous [me comprendrez bien.] Quant
		à votre premiere demande [, la mediation du roi ne peut avoir lieu
		tant que les colonies seront sujettes du roi d’angleterre, qui]
		d’ailleurs [ne l’accepteroit pas.] Quant à votre seconde demande
		[, le roi est vrai chevalier, sa parole lui est sacree, il l’a donnee aux
		anglois de vivre en paix avec eux, et il la tiendra.] Ainsi tant que
		[la france ne sera pas en guerre avec les anglois, il ne s’alliera point
		contre eux avec les colonies, et ne fournira point de secours a ces
		dernieres.] Mais d’un autre côté, et par-là même [les americains
		ont la meme protection] et [liberte que tout autre anglois,
		d’aborder en france,] et [d’en exporter, comme marchandise, des
		armes,] et [munitions de guerre,] sans pourtant [en former des
		magasins en france,] ce qui n’est permis chez aucune nation. Du
		reste, ajouta-t-il, [les colonies n’ont pas besoin] que [ni la france
		ni l’espagne se melent dans cette guerre, le commerce seul fournira]
		aux Américains tout ce dont ils auront besoin pour se bien
		défendre.
	
		Je suis de son avis. Je crois même qu’il vous sera plus avantageux,
		et [a la france aussi, qu’elle ne se presse pas de se declarer
		ouvertement pour vous.] Encore une fois, Messieurs, votre union,
		
		votre constant amour pour la liberté, votre courage à vous passer
		de tout ce qui sent le luxe et à le mépriser, votre haine pour la
		tyrannie et le despotisme, qui sont les tristes fruits du Luxe, enfin
		toutes vos vertus républicaines vous rendront supérieurs à vos
		ennemis et invincibles, même sans alliés. Ceux-ci cependant ne
		vous manqueront pas, soyez en sûrs: car il ne faut pas croire
		qu’avec ce qui se passe dans votre partie du monde la nôtre puisse
		longtemps demeurer en paix. Le temps viendra où vos amis se
		démasqueront, et où votre alliance sera non seulement acceptée,
		mais recherchée. En attendant vous avez fait un grand et sage coup
		de chasser vos ennemis de Bost. Ils publient qu’ils ont évacué la
		place exprès, par ordre et politique profonde; Le public en rit, et
		les siffle. Je finis, Messieurs, par vous souhaiter de toute mon ame
		la plus heureuse campagne, victoire [, Quebec, l’ile de Providence,
		independance,] et [a moi de vivre et mourir votre utile
		serviteur Dumas.] P.S. Postscript.
	
		J’oubliois Messieurs de vous rapporter, que le personnage en
		question m’a offert de me rembourser les fraix de mon voyage; et
		que j’ai répondu qu’ils l’étoient déjà. Sur quoil il me dit de lui dire
		au moins en quoi l’on pourroit me faire plaisir? Je repartis que
		c’étoit en me mettant à même de rendre de grands services aux
		Américains. Enfin il m’a exhorté à correspondre de temps en
		temps avec lui; je m’y suis engagé, et je n’y manquerai pas. Ainsi
		il ne dépend plus que de vous, Messieurs, de rendre cette correspondance
		de plus en plus intéressante. De mon côté je serai vigilant
		à profiter de tous les événements, qui pourront faire quelque
		changement en Europe. Ceux qui arriveront en Amérique, exigeront
		sans doute que Vous, Messieurs, me donniez fréquemment de
		nouvelles instructions et ordres, munis toujours de Lettres de
		créance, ou du moins d’une, qui sera pour le temps que vous
		jugerez à propos. Je sai à qui m’adresser pour faire parvenir de vos
		nouvelles [Messieurs a la cour de france] et [avoir response en peu
		de jours.]
	
 
	6e. Juin 1776
		Voici copie d’une Lettre de Londres en date du 21e. May, vous
		comprenez bien de qui, Je lui avais envoyé, sous les enveloppes
		qu’il m’avoit indiquées, les deux lettres que Mr. Sto. m’avoit
		laissées en dépôt; et j’y avois joint un chiffre, dont il s’est déjà
		servi avec succès.
		
	
		“Everything is safe. I shall write you fully next week by our
		frind Sto. [One Hortalez,] will apply to you on business that
		concerns our frinds. He has your adress. Be so good as to assist
		him.”
	
		Je les attends avec impatience, et ferai tout ce qui dépendra de
		moi pour votre service, Messieurs, et le leur.
	
		Je vous supplie, Messieurs, de me répondre toujours le plutôt
		possible, afin que je sache si mes Lettres vous sont parvenues. Je
		vous enverrai encore une autre fois copie générale de ma
		précédente Lettre A et de celle-ci B. pour remédier à la perte de
		l’une ou de toutes les deux, supposé que les vaisseaux qui les
		portent viennent à périr ou à être pris.
	
		Il faut toujours m’écrire sous l’enveloppe de Mr. M. M. Rey
		Libraire à Amsterdam, si vous m’écrivez par St. Eustache; ou sous
		celle de Mr. A. Stuckey Mercht. Rotterdam si c’est en droiture ou par
		la France.
	
		Quand j’ai promis au Ministre avec lequel je me suis entretenu
		de vos affaires, de ne pas vous le nommer, c’est en tant que vous
		n’exigiez pas expressément que je vous le fasse connoître; car en ce
		cas vous le saurez quand vous voudrez.
	
		Dans environ huit jours je pars d’Utrecht pour une Campagne
		qui me rapproche de 7 lieues de la Haie, et où je compte de passer
		l’Eté.
	
		J’espere que le temps viendra où je pourrai résider là où il vous
		plaira, messieurs, et ne plus travailler que pour vous.
	
		Je ne sai si j’ai déja dit dans une de mes Lettres à Mr. Franklin,
		que depuis un an déjà, j’ai dans ma chambre son portrait gravé.
		J’y ajouterai le Portrait de Mr. Dickenson et de tous les Honorables
		Membres du Congrès, quand j’aurai le bonheur de pouvoir
		me les procurer. Vos, Libertatis assertores, veri mibi patriae patres estis;
		vulgo reges nauci facio.
	
 
	
	
Endorsed: May 14 [?] 1776 From Mr. Dumas Utrecht